Edwin Bourget, lauréate

Écologiste

Naissance le 6 juillet 1946 à Senneterre, décès le à 

Entrevue

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Biographie

Comment peut-on passer sa vie à étudier les moules bleues ou les balanes sans s’ennuyer? Loin de s’offusquer, Edwin Bourget éclate de rire. « C’est bien mal connaître ces animaux que Darwin trouvait fascinants! », laisse simplement tomber le professeur émérite de l’Université Laval, qui a consacré trente ans de recherche aux invertébrés littoraux.

Cette sommité mondiale de l’écologie des systèmes côtiers éprouve très tôt une fascination pour les mollusques et les cirripèdes. Jeune adolescent, il passe ses temps libres à arpenter les côtes des Îles-de-la-Madeleine et de la Gaspésie pour observer les moules, les balanes et les étoiles de mer. « Ces animaux m’intriguaient beaucoup. Je me demandais toujours pourquoi il y en avait à tel endroit et pas à un autre. Les questions que je me posais tout jeune m’ont suivi durant toute ma carrière. »

Au secondaire, Edwin Bourget n’a jamais songé à prendre rendez-vous avec un orienteur. « À 14 ans, il était clair que je serais biologiste marin », confie-t-il. Pendant ses études de maîtrise sur les invertébrés, il approfondit ses connaissances de la faune de l’estuaire du Saint‑Laurent, un champ d’étude peu exploré à l’époque.

En 1971, il entame un doctorat aux Pays de Galles sous la férule du réputé chercheur et professeur D. J. Crisp. Il étudie la structure de la coquille des cirripèdes, des balanes en particulier, afin de percer les mystères de la croissance de ces crustacés. Très doué, il obtient son diplôme en à peine trois ans, au lieu des cinq habituels.

Durant des décennies, Edwin Bourget contribuera à l’avancement des connaissances sur les variations d’abondance et des comportements des populations de cirripèdes vivant du Groenland à la Caroline du Nord. Des animaux dont l’importance est souvent méconnue, rappelle l’éminent biologiste. « Plusieurs espèces nous servent de modèle et fournissent de précieux renseignements qui pourront être appliqués pour comprendre la biologie d’autres espèces plus difficiles à étudier. »

Dès son embauche comme professeur, Edwin Bourget fait montre de ses préoccupations environnementales. Il sensibilise l’opinion publique et les gouvernements aux conséquences écologiques de la fermeture de la baie de la Grosse Île, du développement du parc portuaire de Gros‑Cacouna et du transport d’hydrocarbures entre Montréal et le Bas-Saint-Laurent.

En 1978 et en 1982, il coorganise les deux premiers symposiums sur l’océanographie du fleuve Saint-Laurent.

Faire tomber les frontières des disciplines
Les contributions à l’écologie des invertébrés littoraux de ce scientifique multidisciplinaire en biologie, en écologie et en écophysiologie sont aujourd’hui saluées à l’échelle mondiale.

Mais si Edwin Bourget bénéficie d’une réputation si enviable, c’est également parce qu’il a toujours milité en faveur de la transdisciplinarité. Trop souvent, les chercheurs travaillent isolément, comme enfermés dans leur discipline. Cela nuit à l’avancement de la recherche et de la science. En 1997, comme directeur du Département de biologie et vice-doyen de la Faculté des sciences et de génie de l’Université Laval, il entreprend donc de briser cette culture de silo. Pour ce faire, il crée un bureau de liaison afin d’accroître les partenariats de recherche. Il met aussi sur pied des centres de recherche multi et transdisciplinaires. Les résultats sont instantanés : durant la première année, le nombre et la valeur des partenariats doublent.

Ce grand biologiste est reconnu comme l’un des premiers chercheurs en écologie marine à avoir utilisé les techniques de pointe du génie civil, de la géomatique, de l’hydrologie, du génie électrique, de la génétique et des mathématiques pour faire progresser sa discipline. « La clé, c’est d’ignorer les frontières entre les disciplines, pour ne considérer que la science au sens large », soutient-il.

Au cours de sa fructueuse carrière, ce chercheur de réputation mondiale a reçu plus de 6,8 millions de dollars en subventions de recherche comme chercheur principal et 5,8 millions de dollars en tant que co-investigateur. Il a aussi dirigé et codirigé une quarantaine d’étudiants à la maîtrise et au doctorat, qui poursuivent leur carrière scientifique au Canada, aux États‑Unis, en Amérique du Sud et en Asie.

Edwin Bourget a publié 126 articles scientifiques et 5 livres ou chapitres de livres. Il a de plus siégé au comité de rédaction de nombreux journaux, dont Le Naturaliste canadien, Marine Biology, ÉCOSCIENCE, Environnement et Sécurité et Agricultural Sciences.

Professeur émérite de l’Université Laval depuis 2011, Edwin Bourget a gagné en 2012 le prix Gérard-Parizeau pour sa contribution exceptionnelle à la gestion universitaire. En 2010, il a mérité le Prix de l’Association des administratrices et des administrateurs de recherche universitaire du Québec (ADARUQ). En 2007, il a reçu le Prix Synergie du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et, en 1996, le prix Michel‑Jurdant en environnement.

Un administrateur visionnaire
Le prix Armand-Frappier est surtout remis à Edwin Bourget pour souligner ses talents d’administrateur rigoureux et visionnaire. Car le flair de ce brillant scientifique prônant l’échange de connaissances entre les disciplines n’a pas échappé aux administrations des universités désireuses d’être plus compétitives.

En 2001, l’Université de Sherbrooke lui offre le poste de vice‑recteur à la recherche. Dès son entrée en fonction, il crée l’Institut de l’environnement et du développement durable. Il met aussi sur pied MSBi inc. et gestion SOCPRA, des organismes dont le mandat est de valoriser les fruits de la recherche de l’Université. Encore une fois, les résultats sont au rendez-vous : durant les six années où Edwin Bourget a été vice‑recteur à la recherche, les subventions et les contrats de recherche sont passés de 45 millions de dollars en 2001 à plus de 85 millions de dollars en 2007.

En 2007, il est engagé parl’Université Laval, son alma mater. Pendant trois ans, à titre de vice-recteur à la recherche et à la création, il est fidèle à sa philosophie et s’efforce de faire tomber les frontières interdisciplinaires. Il lance l’Institut de biologie intégrative et des systèmes (IBIS), crée trois bureaux aux missions complémentaires, restructure les cadres conceptuels et organisationnels de la recherche, en plus de réviser les politiques de recherche de l’établissement d’enseignement.

En 2008, il lance, en partenariat avec des entreprises privées et des organismes, l’audacieux programme PAIR (Programme pour l’avancement de l’innovation et de la recherche). L’objectif est de créer, en cinq ans, 100 nouvelles chaires de recherche dotées d’un fonds d’un million de dollars chacune.

Les talents de rassembleur de ce visionnaire sont de nouveaux confirmés alors qu’après seulement deux ans et demi, 26 chaires sont créées pour un total de 125 millions de dollars en investissements. Un succès si spectaculaire que le projet essaime hors des frontières du Québec. Six mois après le lancement du PAIR, l’Université de la Californie à Berkeley lance son propre programme de création de 100 chaires, calqué sur le modèle mis en place par Edwin Bourget. « Le but de ce programme est d’inciter les entreprises et les partenaires industriels à investir en recherche pour de longues périodes, et non plus pour de courtes durées de quelques mois. »

Avec le recul, ce scientifique hors du commun est fier d’avoir formé des biologistes qui « sont capables de voir au-delà de leur discipline » et de contribuer à faire connaître les organismes marins côtiers. « Le chercheur est un aventurier. Il cherche dans une direction, fait des découvertes intéressantes, souvent inattendues, explore plus à fond certaines d’entre elles. C’est ce côté aventurier qui m’a stimulé durant ma carrière », conclut Edwin Bourget.

Information complémentaire

Date de remise du prix :
13 novembre 2012

Membres du jury :
Jacques Ouellet, président
Louis Fortier
Vassilios Papadopoulos
André Lacroix
Michel Patry

Crédit photo :
  • Rémy Boily
Crédit vidéo :
Production : Sylvain Caron Productions Inc.
Réalisation : Sylvain Caron
Coordinatrice de production : Lynda Malo
Caméra et direction photo : Mathieu Harrisson
Caméra : Hugo Ferland-Dionne
Maquillage : Hélène-Manon Poudrette, Sylvie Charland
Montage : Sylvain Caron
Infographie et montage : Mathieu Harrisson
Mixage sonore : Studio Song
Musique originale : Christine Boillat
Musiciens : André Bilodeau, Christine Boillat, David Champoux et Daniel Marcoux
Entrevues : Christian St-Pierre
Texte :
  • MDEIE