Henry Mintzberg, lauréate

Spécialiste en stratégie des organisations

Naissance le 2 septembre 1939 à Montréal, décès le à 

Biographie

Une nouvelle conception
de la gestion

« On ne peut pas former des gestionnaires dans une salle de classe! Les
programmes de MBA engendrent une néo-aristocratie composée de
gens qui se croient permis de diriger d’importantes sociétés simplement
parce qu’ils ont fait deux ans d’études », affirme Henry Mintzberg,
lui qui enseigne la gestion depuis près de 30 ans à l’Université
McGill où il est titulaire de la prestigieuse chaire Cleghorn à
la Faculté d’administration. S’il n’en tenait qu’à lui, il proscrirait
l’enseignement de la gestion à ceux qui n’auraient pas d’abord acquis
une expérience valable de manager au sein d’une entreprise et une formation
dans au moins une autre discipline (droit, génie, sciences politiques,
etc.) assortie d’une solide culture générale. Cette position radicale
paraît provocatrice de la part d’un professeur. Or, les théoriciens,
les gestionnaires et les dirigeants de grandes compagnies s’entendent pour dire
que les observations et les conclusions d’Henry Mintzberg ont littéralement
ébranlé les concepts fondamentaux de la gestion et sont, aujourd’hui,
devenues des références.

Des recherches étonnantes

Diplômé en génie mécanique de l’Université
McGill en 1961, Henry Mintzberg travaille au Canadien National (1961-1963) avant
de revenir aux études pour obtenir un doctorat de la Sloan School of
Management du Massachusetts Institute of Technology (MIT) en 1968. Or, il faudra
attendre jusqu’en 1973 pour que l’éditeur Harper & Row publie The
Nature of Managerial Work
, premier ouvrage d’Henry Mintzberg. Traduit et
publié en français en 1984 sous le titre : Le manager au quotidien,
ce livre marque l’histoire de la gestion. Vendu à plus de 100 000 exemplaires,
il est aussi disponible en italien, en danois, en espagnol, en suédois,
en portugais, en japonais et même en chinois!

Henry Mintzberg présente dans cet ouvrage les conclusions d’une étude
fondée sur l’observation directe du travail quotidien de cinq grands
dirigeants. Ses observations montrent que le travail du gestionnaire, loin de
se ramener à une série de tâches bien ordonnées,
est fragmenté, changeant et essentiellement déterminé par
toutes sortes de sollicitations provenant tant de l’intérieur de l’entreprise
que du milieu externe. De plus, elles révèlent que le dirigeant
passe plus des deux tiers de son temps à parler et à écouter
dans une situation où il est le point de convergence de nombreuses catégories
d’interlocuteurs : supérieurs, pairs, collaborateurs, subordonnés,
etc. À la gestion considérée jusqu’alors comme un mode
d’action rationnel s’appuyant sur des normes idéales, Henry Mintzberg
substitue une description du travail du gestionnaire et, par là, modifie
du tout au tout la perception du bon fonctionnement d’une entreprise.

Henry Mintzberg s’intéresse ensuite aux stratégies dans les entreprises
et révèle, là encore, que les stratégies créatives
ne sont pas élaborées de façon analytique et cérébrale.
Elles émergent, au contraire, de l’interaction de nombreux collaborateurs,
dont ceux qui ont une longue expérience de l’entreprise et qui sont,
en outre, profondément engagés envers elle.
Véritable anthropologue des organisations, Henry Mintzberg privilégie
une approche qualitative et descriptive. En ce sens, il enrichit et réhabilite
une forme de pensée qui fait appel au jugement et à l’intuition.
La méthode qu’il a mise au point est désormais connue sous le
nom de l’« approche Mintzberg ».

L’enseignement et les récompenses

Principal architecte du programme commun de doctorat en administration, donné
par les quatre universités montréalaises, Henry Mintzberg contribue
à faire reconnaître Montréal comme un des plus importants
centres de recherche sur la stratégie en raison du grand nombre et de
la qualité des publications produites par ses établissements universitaires.
Il prend part à une refonte complète de l’enseignement de la gestion
à l’occasion de la mise sur pied d’un programme de maîtrise international
actuellement donné dans les écoles d’administration les plus prestigieuses
de cinq pays : le Canada, l’Angleterre, la France, l’Inde et le Japon. Henry
Mintzberg est aussi professeur d’organisation à l’Institut européen
d’administration des affaires (INSEAD), en France.

Premier membre d’une faculté d’administration à être nommé
à la Société royale du Canada et auteur d’une centaine
d’articles et de onze ouvrages, Henry Mintzberg remporte le prix McKinsey pour
le meilleur article dans la Harvard Business Review, en 1975, et le second
prix, en 1987. Il est membre de l’International Academy of Management (1985),
de l’Academy of Management (1987) et de la World Academy of Productivity Sciences
(1995). Douze universités lui ont décerné un doctorat honoris
causa : Venise, Lund, Lausanne, Montréal, Genève, Liège,
Simon Fraser, Ghent, Lancaster, Paris IX et Concordia. Son ouvrage intitulé
: The Rise and Fall of Strategic Planning (1994) remporte en 2000 le
prix George R. Terry, décerné par l’Academy of Management. Les
études actuelles d’Henry Mintzberg s’attaquent à des secteurs
névralgiques : l’organisation des soins de santé et les modes
de gestion du gouvernement.

Henry Mintzberg adopte souvent des points de vue qui vont à contre-courant
des conceptions communément admises, mais son anticonformisme est le
propre d’une attitude scientifique. Partant de l’observation et de la mise en
corrélation des faits, il rend intelligibles les phénomènes
et les éclaire grâce à ses analyses et à ses synthèses.
Dès lors, il justifie pleinement la qualité de science attribuée
à la gestion. Ses théories, qui paraissaient au départ
erronées et provocatrices, sont considérées aujourd’hui
comme évidentes.

Résumé de la carrière de Henry Mintzberg

1968
Doctorat de la Sloan School of Management du Massachusetts Institute of Technology

1968-
Professeur à la Faculté de gestion de l'Université McGill

1980
Membre de la Société royale du Canada

1996
Titulaire de la chaire Cleghorn en management de l'Université McGill

1996
Prix Léon-Gérin

1998
Officier de l'Ordre du Canada

1998
Officier de l'Ordre national du Québec

2000
Prix « Distinguished Scholar » de l'Academy of Management

Information complémentaire

Date de remise du prix :
7 décembre 1996

Membres du jury :
Jennifer Stoddart (présidente)
Pierre Maranda
Orlando Peña
Guy Rocher
Jean-Claude Thibodeau
Crédit photo :
  • Roch Théroux
Texte :
  • Bernard Lévy
Mise à jour :
  • Nathalie Dyke