Michel G. Bergeron, lauréate

Microbiologiste infectiologue

Naissance le 25 novembre 1943 à Québec, décès le à 

Entrevue

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Biographie

Certaines personnes ont la capacité inouïe de faire avancer la société dans une direction qui semble au départ impossible. C’est le cas du docteur Michel G. Bergeron, directeur du Centre de recherche en infectiologie (CRI) de l’Université Laval, situé au CHUL du Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ). À 61 ans, alors qu’il pourrait commencer à penser à une douce retraite, le docteur Bergeron cherche à renverser la façon dont on diagnostique les maladies infectieuses. « Je rêve de remplacer la microbiologie pasteurienne par la microbiologie à base d’ADN », avance-t-il sans ambages.

Et cette idée révolutionnaire n’est pas prise à la légère. Depuis 1985, le docteur Bergeron et son équipe de chercheurs travaillent d’arrache-pied à mettre au point des tests diagnostiques à partir de l’ADN des microbes plutôt qu’à partir de cultures bactériennes. Et ils réussissent. Cette percée scientifique a non seulement eu lieu – publiée en primeur dans le prestigieux New England Journal of Medicine en 2000 -, mais il est désormais possible d’identifier un microbe en 45 minutes plutôt que d’attendre les quelques jours habituellement nécessaires. Grâce à ce diagnostic rapide, la médication prescrite est beaucoup plus appropriée, ce qui évite la surconsommation d’antibiotiques et la résistance des microbes à ceux-ci. Un véritable tour de force dont le docteur Bergeron se réjouit, sans compter les centaines d’emplois que ses découvertes ont permis de créer.

Le CRI, que le docteur Bergeron a fondé en 1974, figure aujourd’hui comme l’un des plus importants centres au monde consacrés à l’étude des maladies infectieuses avec un budget annuel de 20 millions de dollars. Le docteur Bergeron a recruté la crème des chercheurs dans ce domaine. Employant près de 250 personnes, dont des chercheurs venant de 19 pays différents (« Ce sont les Nations Unies ici », s’amuse-t-il à dire), son centre est à la fine pointe de la recherche. Pour commercialiser ses tests, le docteur Bergeron a fondé l’entreprise Infectio Diagnostic en 1995. Située à Québec, cette dernière emploie 75 personnes.

En rétrospective, le docteur Bergeron regarde le chemin parcouru avec une grande satisfaction. Jusqu’en 1985, il travaille sur les infections rénales et la pharmacologie des antibiotiques, soit tout ce qui concerne les traitements médicaux : « Après dix années de pratique, je me suis rendu compte de l’absence de bons outils pour diagnostiquer rapidement les maladies infectieuses. Voilà l’orientation qu’il fallait donner aux recherches. » Graduellement, il passe aussi d’une approche thérapeutique à une approche beaucoup plus préventive. Une autre de ses grandes réalisations est l’invention du « condom invisible® », ce gel qui permet aux femmes de se protéger contre les maladies transmises sexuellement (MTS) et le VIH/SIDA. En deuxième phase d’investigation clinique au Cameroun, ce produit devrait être commercialisé en 2010. « Selon certaines études, avance le docteur Bergeron, un tel gel pourrait prévenir 2,5 millions d’infections par le VIH par année. » Or, l’application des technologies exige du temps et un changement de mentalité. « C’est très long, constate-t-il. Parfois, la société n’est pas prête à introduire de nouvelles façons de faire, et il faut au moins une génération pour implanter de bonnes idées. » Son intention pour les années à venir est de continuer à concevoir des technologies pour améliorer la santé des citoyens de pays développés ou en voie de développement. L’énergie que déploie cet homme dans la réalisation de son rêve est phénoménale. Animé d’une grande force intérieure qui le pousse au dépassement, il se sent redevable à la société. « Je suis né dans une bonne famille, on m’a donné les capacités intellectuelles de réussir, j’ai une excellente santé. Dans ma vie personnelle, je suis entouré d’une femme merveilleuse et de trois enfants qui m’encouragent; dans ma vie professionnelle, d’une équipe de chercheurs qui croient en ma vision. Ce serait un gaspillage de ne pas utiliser toute cette énergie à bon escient », explique-t-il. Le docteur Bergeron reconnaît que, pour réussir en recherche, on doit en quelque sorte être un peu « olympien ». C’est d’ailleurs le message qu’il s’efforce de transmettre aux nombreux étudiants de troisième cycle ou qui font des études postdoctorales venus travailler à son centre : « Je les prépare à affronter la concurrence, il faut toujours se battre. C’est de l’olympisme à l’année et pendant toute une vie. »

Fils unique, Michel G. Bergeron a grandi dans une famille ouvrière du quartier Montcalm de Québec. Premier de classe au primaire et au collégial, le jeune Bergeron a suivi, parallèlement à son cours classique à l’Académie de Québec, une formation de trompettiste au Conservatoire de musique. Cette première grande passion a failli d’ailleurs le mener à une carrière professionnelle de musicien jusqu’au jour où il a finalement choisi la médecine en 1964. « J’ai senti jeune que ça me prendrait une profession où j’allais être très occupé », affirme-t-il.

Diplômé en médecine de l’Université Laval, le docteur Bergeron poursuit sa spécialité en médecine interne à l’Université McGill, puis il part travailler au New England Medical Center de l’Université de Tufts à Boston, où il a le privilège de côtoyer Louis Weinstein, microbiologiste infectiologue, expert de renommée mondiale en matière d’antibiotiques, qui deviendra un véritable mentor, ainsi que le docteur Salvador Luria, Prix Nobel de médecine en 1969, qu’il a fréquenté au Massachusetts Institute of Technology (MIT). « Les professeurs ont une immense influence sur la destinée d’un jeune », reconnaît-il. Convaincu de l’importance de l’éducation, il a lui-même mis sur pied en 1998 le programme Chercheur d’un jour au CRI, programme destiné aux élèves du secondaire pour les initier à l’univers de la recherche. « C’est un âge formidable, tout se joue entre 10 et 16 ans », croit le chercheur convaincu de la nécessité d’exposer les jeunes à des expériences positives. Père de trois enfants et grand-père depuis peu, le docteur Bergeron accorde d’ailleurs la même qualité d’attention à sa famille qu’à son travail.

Pour continuer son marathon scientifique, le docteur Bergeron siège à plusieurs comités prestigieux, a présidé bon nombre de sociétés scientifiques canadiennes et internationales et est l’auteur de près de 400 publications. « Je ne sais pas comment l’expliquer, dit-il, mais je suis toujours excité d’arriver au travail le matin. » Un enthousiasme qu’il compte canaliser pour plusieurs années encore au service de la recherche.

Information complémentaire

Date de remise du prix :
8 novembre 2005

Membres du jury :
Nicole Gallo-Payet, présidente
Catherine Bushnell
Pavel Hamet
Sylvie Marcoux
Marie Trudel

Crédit photo :
  • Denis Chalifour
Crédit vidéo :
Production : Éric Pfalzgraf / Studio du Roi
Réalisation : Mario Munger / Éric Pfalzgraf
Caméra, direction photo : Mario Munger
Son : Éric Pfalzgraf
Montage : David Paré / Éric Pfalzgraf
Infographie : Daniel Boulanger
Musique originale : Alexis Le May
Musiciens : Katia Durette, Yana Ouellet, Stéphane Fontaine, Annie Morier, Caroline Béchard, Suzanne Villeneuve, Benoît Cormier, Jean Robitaille, André Villeneuve, Daniel Tardif, Alexis Le May, Éric Pfalzgraf.
Annonceur : Gilles Théberge
Enregistrement de la musique et mixage : Éric Pfalzgraf
Photos supplémentaires, animations et extrait de film pour :
M. Cyril Simard : Suzanne O’neill, Éric Saint-Pierre, Guy Rainville, François Maltais;
Mme Francine Décary : Héma-Québec;
M. Henry Buijs : ABB;
M. Fernand Dansereau : ONF.