Réjean Ducharme, lauréate

Naissance le 12 août 1941 à Saint-Félix-de-Valois, décès le 21 août 2017 à 

Biographie

L’homme dont la plume poète a joué avec les mots, allant même
jusqu’à inventer ceux qu’on avait oublié de créer pour
dire ce que l’on sent, là, au fond de son âme, a choisi de se fondre
dans la jungle urbaine plutôt que de jouer le jeu du vedettariat.

On ne connaît pas Réjean Ducharme, mais est-il nécessaire
de démasquer celui qui nous a donné certains des romans les plus
originaux de notre littérature, qui a offert sa plume au théâtre,
au grand écran et même à l’un de nos chansonniers ? Est-il
nécessaire de percer le mystère de cet homme pour qui, de toute
façon, le métier d’écrivain est un métier comme
un autre ? Ce qui importe, en fait, c’est de lire Ducharme, d’entrer dans son
univers parfois pessimiste, souvent poétique, mais toujours empreint
d’une grande sensibilité à l’égard de la nature humaine.

À travers les mots de Ducharme, à travers ses personnages qui
ont toujours le mal de vivre à fleur de peau, on pénètre
dans un univers romantique aux nuances passéistes. Ses héros sont
le plus souvent déchirés entre un besoin pressant d’amour et un
désir profond de s’exclure, de se refermer sur soi. Réjean Ducharme
leur fait jouer le jeu du refus, le jeu de la tendresse, le jeu de la violence.

L’écrivain leur prête un regard parfois envieux sur cette époque
bénie de l’enfance, quand il ne leur confie pas tout simplement le « 
je » de ses livres comme dans L’Avalée des avalés
(1966), son premier roman. À la fois cruels et attachants, les enfants
de Ducharme ont cette capacité de faire un pied de nez aux adultes en
leur montrant l’absurdité de leur propre vie. Leur lucidité les
pousse vers l’aliénation parce qu’ils savent que, quoiqu’ils fassent,
ils ne seront jamais à leur place. L’exclusion semble être la seule
solution. Et c’est peut-être dans L’Hiver de force (1973) que ce
refus du réel atteindra son paroxysme.

À travers la quête d’une certaine pureté, entre l’humour
noir et le cynisme, la critique sociale et la défense des gagne-petit,
Réjean Ducharme nous présente des grands enfants qui souffrent.
Il aura mis sur papier ces mots (ou ces maux, dirait-il) qui sont propres à
chacun de nous ; ces mots que l’on n’ose prononcer parce qu’ils font parfois
trop mal pour être vrais, des mots comme ceux qui ouvrent Va savoir
(1994) : « Il faut investir ailleurs, la vie, il n’y a pas d’avenir
là-dedans. »

Information complémentaire

Date de remise du prix :
23 novembre 1994

Membres du jury :
Lise Gauvin (présidente)
Gilles Archambault
André Carpentier
Denis Saint-Jacques
Crédit photo :
  • Claire Richard
Texte :
  • Yolande Côté et Claude Janelle